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Organisation apprenante et employabilité : interview d’Alexandra Lange – AG2R La Mondiale

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"L’entreprise apprenante, c’est vraiment le Graal : les métiers bougent, il faut apprendre tout le temps pour rester à haut niveau. Cela m’évoque également la notion de curiosité : comment faisons-nous en sorte en tant qu’employeur que chaque situation soit une situation où on apprend et comment valoriser cela ?"

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Interview d’Alexandra Lange, Directrice du Développement RH chez AG2R La Mondiale

Comment êtes-vous devenue Directrice du développement professionnel chez AG2R La Mondiale ?

Progressivement, c’est un cheminement. Je suis rentrée dans le groupe il y a 9 ans pour travailler sur la formation. Pendant de longues années j’ai travaillé pour faire monter en compétences l’ensemble des équipes et accompagner la transformation. Cela m’a amenée à être aujourd’hui directrice du développement professionnel au sein du groupe AG2R La Mondiale : je pilote tous les sujets autour de la formation, le talent management, les people review, l’évolution prospective des métiers…

Que vous évoque la notion d’entreprise apprenante ?

L’entreprise apprenante, c’est vraiment le Graal : les métiers bougent, il faut apprendre tout le temps pour rester à haut niveau. Cela m’évoque également la notion de curiosité : comment faisons-nous en sorte en tant qu’employeur que chaque situation soit une situation où on apprend et comment valoriser cela ? Comment embarquer les managers et les collaborateurs autour du sujet de l’apprentissage en continu ?

Quelles sont les spécificités du secteur de l’assurance qui favorisent ou freinent la démarche d’entreprise apprenante ?

L’assurance est un environnement très technique où il est crucial de démontrer son expertise sur les différents métiers. Nous avons un ADN de compétences sur les hards skills très fort et également une culture du contrôle (minimiser les risques).

Nous devons mieux mettre en valeur les soft skills : la capacité à apprendre, à prioriser, la curiosité, la prise de recul…

Nous avons besoin de développer davantage de flexibilité, de fluidité dans nos postures tant du point de vue managérial que collaborateur.

Pouvez-vous nous donner quelques exemples de dispositifs innovants déployés  ?

Dans le cadre de notre transformation digitale, nous avons mis en place des zones d’expérimentation : l’enjeu est de rassembler des collaborateurs d’horizons différents sur un sujet bien cadré et les faire travailler avec un mode plus ouvert dans un tempo plus resserré avec des méthodes d’animation nouvelles.

Ces expérimentations ont donné des résultats très intéressants et ont permis d’aborder le sujet de la coopération de manière différente.

L’open innovation est-elle est un levier d’apprentissage ? 

Il se passe beaucoup de choses en dehors et il est très important d’être à l’écoute de son environnement. Nous avons la responsabilité du développement de nos équipes et il est important de réorienter régulièrement les collaborateurs vers l’externe.

L’entreprise apprenante doit pouvoir embrasser tout un environnement de partenaires et d’écosystèmes avec des échanges de services, des approches différentes…

Comment trouver un équilibre entre l’accélération des changement et le temps nécessaire pour s’approprier ces changements ?

Effectivement, ce sont 2 temporalités contradictoires qui sont ressenties par les collaborateurs et les managers : les injonctions très fortes s’opposent au temps humain de l’apprentissage et de l’appropriation.

Je suis convaincue que les managers, qui sont fortement critiqués ces dernières années, ont un rôle absolument fondamental ; il est important de bien les onboarder dans le sens de ces transformations car ce sont eux qui sont chargés de faire le lien.

La GPEC, c’est has been ?

Absolument pas. Le sujet est d’autant plus urgent et important aujourd’hui que nos métiers et nos activités évoluent soit parce qu’elles disparaissent, soit parce qu’elles émergent, soit parce que leur contenu change…

Face à ces bouleversement très forts, il me semble important de donner régulièrement des points de repère, c’est notre responsabilité.

Nous travaillons avec nos branches (retraite complémentaire et assurance) et avec nos patrons qui font un travail formidable en matière de prospective sur l’évolution de nos métiers. Il nous revient ensuite de restituer tout cela et de le rendre le plus proche possible des collaborateurs.

Vers quoi évolue le talent management ?

Le talent management évolue parce que dans un environnement où l’expertise est importante, notre rôle est d’identifier les profils qui outre ces hard skills ont aussi la capacité à développer toute cette palette de soft skills : flexibilité, écoute, réflexivité… Tous ces éléments viennent enrichir et remettre en question notre propre référentiel de compétences.

Est-ce que la division et la spécialisation du travail va continuer ou se résorber dans les années à venir ?

Aujourd’hui, beaucoup de nos métiers s’hybrident. Par exemple, nos gestionnaires sont de plus en plus en relation avec les clients et ont conscience de l’importance de ce lien (image de marque, rebond business, recommandation, etc.). Cela renvoie à la palette de compétences à développer et la capacité à s’adapter.

On entend souvent dire que les métiers ont disparu et que demain on ne pensera qu’aux compétences : est-ce que c’est vraiment le cas ?

Je n’irais pas jusque-là. Je pense que nous avons des expertises métiers extrêmement fortes pour peu qu’elles s’adaptent aux nouveaux écosystèmes en s’appuyant sur cette hybridation. Nos métiers demeurent, l’expertise est sans doute l’un de nos piliers pour aborder l’avenir de manière sereine.

Comment est organisé le développement des compétences chez AG2R La Mondiale ?

Il y a quelques années, notre enjeu majeur était celui du digital sous l’angle outils (acquisition de LMS, création de contenu, partenariats avec des start-up). Cela nous a permis de nous mettre à niveau dans la capacité à déployer massivement du digital learning, à concevoir et à contractualiser avec les bons acteurs sur le marché.

Depuis deux ans, nous sommes entrés dans une autre période avec des éléments nouveaux : il faut se concentrer sur l’expérience de l’apprenant. Nous devons nous mettre à la place du collaborateur quelle que soit sa situation : quelle est son expérience et qu’est-ce qui lui donnera envie de se former ?

L’autre sujet qui vient d’émerger, c’est comment les métiers s’approprient beaucoup plus la formation. Nous sommes dans une coopération très étroite avec chacun de nos grands métiers et nous co-construisons le plan d’accompagnement de la formation : identifier les thématiques d’accompagnement , le calendrier, les partenaires mobiliser les managers…

Le troisième axe, c’est celui de la réactivité : on doit pouvoir aller plus vite dans la captation du besoin, la diffusion, le pilotage, etc. C’est l’objet de la création de notre Learning Lab : l’enjeu est d’outiller à la fois les chargés de formation et les métiers pour les aider à déployer massivement des contenus innovants, attractifs que l’on peut tracer et piloter.

Le dernier élément, c’est le volet de mise en oeuvre. Nous avons mis en place un centre de services dédié à la mise en oeuvre de la formation dont l’activité au quotidien est de s’assurer que l’ensemble des milliers d’heures de formation soient déployées dans les meilleures conditions possibles.

Est-ce que l’employabilité est un levier de motivation ?

Ça l’est de plus en plus parce qu’on est sur une accélération du temps et de la transformation des métiers. Qu’on le veuille ou non, parler d’employabilité ne peut plus être un tabou. Ça n’en reste pas moins potentiellement un sujet anxiogène. Notre rôle est d’outiller, de restituer, de donner des repères aux collaborateurs sur l’évolution de leurs métiers, de donner des outils pratiques et concrets, de donner visibilité sur parcours de formation sur lesquels nous pouvons les accompagner…

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