Le Royaume-Uni pense établir sa politique de visas d'immigration en fonction des compétences des candidats. Quelles conséquences pour l'employabilité du pays ?
14 mars 2020
Mi-février 2020, alors que le monde entier commence à se préoccuper du coronavirus, le gouvernement de Boris Johnson annonce que dans la foulée du Brexit, les visas d’immigration seraient désormais attribués en fonction des compétences des candidats. L’objectif : flécher l’emploi vers nos amis britanniques et réduire la « concurrence » étrangère. C’est oublier un peu vite que la majorité de ces emplois sont au choix et non exclusifs entre eux 1) sous-payés 2) situés dans des centres urbains et non dans les zones périurbaines ou rurales où le chômage est élevé 3) sont des métiers pénibles et peu reconnus que les Britanniques ne veulent pas faire dans ces conditions.
Pour justifier cette mesure, un chiffre massue est annoncé : selon le décompte de Channel 4 (regardez à partir de 3,50) 8,48 millions de Britanniques ne travaillent pas et pourraient donc récupérer des emplois aujourd’hui occupés par des étrangers.
Problème : sur ces huit millions, 27% sont étudiants, 26% sont en incapacité de travailler, 27% sont aidants ou s’occupent d’une famille (ce qui n’est pas reconnu comme un travail), et 13% sont retraités. Le vivier potentiel est donc beaucoup plus faible… Les Britanniques auraient-ils copié leurs voisins Français, ces fainéants notoires qui ne veulent pas travailler alors qu’il leur suffirait, comme chacun sait, de traverser la rue ?
Ce choix d’attribuer des visas en fonction du niveau de diplômes et non de compétences réelles reflète une version élitiste et hors-sol de ce qu’est justement une compétence. Les métiers de la restauration, de la santé, du soin, pourtant en forte pénurie et peu valorisés, sont considérés comme « low-skilled ». Au-delà d’une vision rétrograde de la compétence et méprisante pour des millions de personnes, cette loi montre un refus de s’intéresser aux vrais enjeux de l’employabilité : les salaires, la pénibilité, l’imaginaire négatif associé à certains métiers, la qualité du travail, les temps de transport, les biais cognitifs dans le recrutement.
Pas de diplôme, pas de visa ? Affaire à suivre.
Antoine Amiel
CEO de Learn Assembly
Learn Assembly est une learning compagnie dont la mission est d’aider les entreprises à développer l’employabilité de leurs salariés, de manière saine et durable. Architecte et bâtisseur d’expériences apprenantes, nous designons des solutions innovantes de learning pour plus de 200 clients. Learn Assembly c’est aussi Learning Boost, la première solution d’auto-positionnement entièrement personnalisable.