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Des emplois pour tous avec le numérique ?

Des emplois pour tous avec le numérique ?

Learn Assembly Papers avait le plaisir d’être invité au colloque “Des emplois pour tous demain avec la tech ?” organisé par le think tank et action lab #Leplusimportant et Social Builder.

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Un petit mot sur ce think tank qui a gardé le think mais a su éviter le tank qui menace de nombreux groupes de pensée institutionnels. Communauté agile, travaillant à distance via des outils collaboratifs, mouvement citoyen plus que think tank porteur d’intérêts privés, #Leplusimportant (ne pas oublier de dire le hashtag) est en soi une innovation dans le monde feutré et protocolaire de l’influence et des décideurs. Organisé à l’Assemblée Nationale, le colloque a offert aux participants une vraie prise de hauteur sur les enjeux de l’employabilité à l’heure du numérique.

On retiendra des différentes interventions un constat partagé d’inquiétude sur de l’impact du numérique et de l’IA sur l’emploi, constat bien résumé par Françoise Mercadal-Delasalles, DG du Crédit du Nord : “Quand on est un jeune de 20 ans et qu’on entend qu’il n’y aura plus d’emploi et plus de planète, ça commence mal. Nous devons porter un message moins anxiogène et porteur d’espoir”.

Quel impact l’IA va-t-il engendrer sur l’emploi ?

Enrichi par les apports très concrets et chiffrés d’intervenants du Bureau International du Travail et de l’OCDE, le colloque a permis d’y voir plus clair. Enfin des chiffres et du concret, pour sortir des poncifs…Ekkehard Ernst du Bureau International du Travail a brossé un panorama de l’impact de l’IA sur l’emploi en rappelant que 70% des brevets déposés en IA depuis 2016 portent sur de l’automatisation de tâches.

Mais les dernières tendances de l’IA indiquent que les technologies d’IA ne se contentent désormais plus de s’attaquer à des tâches répétitives, mais s’intéressent également aux tâches cognitives et créatives. “On dépasse l’ère de la substitution, pour entrer dans l’ère de l’augmentation”. Et de conclure que l’IA pourrait non pas détruire de l’emploi, mais transformer de manière très profonde des métiers, et pas seulement des métiers répétitifs. Les métiers créatifs sont eux aussi impactés, l’IA permettant de les “augmenter”.

"Les technologies d’IA ne se contentent désormais plus de s’attaquer à des tâches répétitives, mais s’intéressent également aux tâches cognitives et créatives"

On peut donc distinguer trois types d’impact sur l’emploi : les métiers qui vont être automatisés et disparaître, les métiers qui vont être si fortement transformés que leur nature même sera amenée à changer et les métiers qui n’existent pas encore.

En effet, la transformation numérique impacte tous les métiers, y compris les managers. C’est également le point de vue de Godefroy de Bentzmann, président du Syntec Numérique pour qui l’employabilité des managers est un enjeu encore largement sous-estimé. Aplatissement des organisations, automatisation des tâches de reporting, posture coaching : autant d’impacts massifs sur l’employabilité de cadres non dirigeants.

source: Muriel Brunet

Un changement à faire sur plusieurs échelles

Alors que faire ? Les solutions existent. Le sourcing : en diversifiant les profils. Et la formation bien sur. Comme le rappelle Marieke Vandeweyer de l’OCDE, l’enjeu numéro 1 est encore l’accès à la formation. Les citoyens qui n’ont pas ou mal recours à des droits qu’ils sont en théorie en capacité d’exercer reste majeur.

Quelques chiffres de 2013 (on aurait aimé des chiffres plus à jour) indiquent que le taux d’accès à la formation par an dans les pays de l’OCDE se situe entre 25% à 50%, la France étant à 40%. Ce chiffre assez moyen au regard des milliards investis, et masque de grandes inégalités. C’est malheureusement dans les TPE que le taux d’accès est le plus faible. A l’inverse,  les entreprises répondantes à notre baromètre des entreprises apprenantes se situant elles autour de 80% de taux d’accès à la formation par salarié par an. Sans surprise, ce sont des entreprises du CAC 40…

"Le taux d’accès à la formation par an dans les pays de l’OCDE se situe entre 25% à 50%, la France étant à 40%"

On le sait, l’accès à la formation reproduit les inégalités sociales : les individus les plus menacés par le décrochage numérique et l’automatisation de tâches dans les métiers qu’elles exercent sont celles qui ont le moins accès à la formation. L’une des raisons étant la difficulté des individus à faire des choix informés, à trouver la bonne formation, à être correctement accompagnés par les acteurs de l’insertion.

La formation pour tous n’est pas la solution magique. L’enjeu est aussi de changer de regard sur les demandeurs d’emploi et les reconversions. Comme le rappelle avec énergie et justesse Audrey Pérocheau, directrice de la formation chez Pôle Emploi, les entreprises continuent encore trop souvent à exiger des candidats absolument parfaits, déjà compétents, sans leur donner le temps d’apprendre et les accompagner. “Il faut absolument changer la représentation de la formation chez les recruteurs. Un manque de compétences ne peut pas donner lieu à une fin de non-recevoir” martèle-t-elle. Des dispositifs comme le POI permettent de répondre à ce sujet en co-finançant des formations.

“Il faut absolument changer la représentation de la formation chez les recruteurs"

Travailler sur les biais cognitifs des recruteurs plutôt que dépenser des milliards dans des formations est évidemment la priorité, pour que les dispositifs de formation garantissent une meilleure insertion. Et pour que les certifications ne soient pas perçues comme des diplômes au rabais et donc des voies de garage, c’est tout un travail de changement de mentalité qui est nécessaire.

Travailler sur l’imaginaire de la formation, les représentations mentales, le recrutement, les croyances limites : c’est ainsi que se développera en France une vraie culture de la reconversion et de la mobilité…Denis Bismuth, membre de l’EMCC et spécialiste de l’apprenance le dit ainsi : “ Apprendre devient un geste métier. Aujourd’hui, la formation produit de l’adaptation, pas de l’adaptabilité…”


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